Crouler sous le boulot, est-ce normal ? Dans certaines entreprises, c’est pourtant devenu la norme…
> Aujourd’hui, plus d’1 salarié sur 2 estime que sa charge de travail est trop importante.
Des chiffres sur le burn-out, des conseils pour « capter les signaux faibles » chez ses employés… Vous n’en pouvez plus, et moi non plus. Je vous épargne donc le rapport de notre Ministère du Travail sur « La santé mentale : grande cause nationale 2025 ».
À la place :
1- J’ai lu cette pépite : “Today was Fun”, de Bree Groff. Un guide pratique sur la joie au boulot sorti cet été aux États-Unis. Les meilleurs extraits dans cet article.
2- Je suis allée voir du côté de nos voisins européens. Au-delà de leurs prouesses en automobile et mobilier design, ils sont vraiment innovants.
Trop de travail : nous en sommes toujours au même stade
La To-do liste : un problème systémique
Dans beaucoup d’univers (communication, juridique, finance) « les charrettes » n’ont rien d’exceptionnel. Rester toute la nuit au bureau, commander des pizzas pour tous et rebooter un Mac gros comme une télé avec radio Nova à fond, c’est so ‘90s. Aujourd’hui, la surcharge professionnelle, ce sont plutôt des salariés épuisés, écouteurs Bluetooth enfoncés jusqu’au cerveau, des managers qui en sont à leur 6ème café, des soirées dans un open space studieux, des réunions dans une salle sans fenêtres avec une écocup devant soi. Comment en est-on arrivé là ?
Le problème, c’est quand dépasser ses objectifs devient la norme… et que la surcharge est attendue. - Bree Groff
Voilà la différence : nous sommes passés de quelques longues nuits en équipe pour boucler un projet… Au « trop de boulot par défaut ». L’éthique de travail a changé de socle : elle ne repose plus sur le « bien faire », mais sur le « surfaire ». Aller au-delà des chiffres, au-delà des heures inscrites dans le contrat, c’est devenu le minimum pour être estimé. C’est cette culture du “above and beyond” (au-dessus et au-delà) qui fait autant de dégâts.
Le sandwich hiérarchique
En tant que leader, quand mon équipe est sous l’eau, je le vois comme un échec personnel. - B.G.
Voici l’avis tranché de Bree Groff. Mais, même si elle est soumise à des attentes, elle a choisi la plupart de ses collaborateurs et missions. Si ses équipes sont submergées, c’est donc bien SA responsabilité.
Imaginez un instant : vous êtes manager. C’est réellement votre job ? Jetez un coup d’œil ici. Mieux vaut être préparé.e que dépassé.e !
Vous êtes donc responsable d’équipe. Vous n’avez probablement pas choisi vos supérieurs hiérarchiques, ni les chiffres à atteindre avant Noël. On vous parle depuis des années de santé mentale, à juste titre. Vous voulez garder vos n-1 motivés et épanouis. Sprint du Q4, bilans financiers à boucler, longues soirées, budgets serrés… A peine rentré de vacances, tout le monde est déjà sous pression. Résultat ?
« 6 managers sur 10 déclarent que la santé mentale et les risques psychosociaux occupent une part croissante de leur temps de travail. Beaucoup décrivent des injonctions paradoxales : devoir à la fois atteindre les objectifs fixés & protéger leurs équipes du stress. »
Une équipe poussée à bout n’est donc pas forcément un échec de management. Ce n’est la faute de personne, et la responsabilité de tout le monde.
Vous êtes déprimés ? C’est que j’ai réussi mon exposé… Place aux solutions.
Surcharge de travail : nos solutions concrètes
Nous faisons en sorte que cette surcharge reste exceptionnelle : une déviation, pas la norme. -B.G.
S’organiser avec flexibilité
1- Anticiper les rushs.
Une évidence, mais, sous les piles de dossiers, personne n’a le temps de s’en soucier. D’où l’intérêt d’automatiser. Prédire les pics grâce à l’analyse des historiques de commandes et aux outils d’IA. Puis intégrer ces modèles prédictifs aux plannings RH. N’oubliez pas d’être poli.e avec ChatGPT, il vous épargnera quand les robots auront décidé de décimer l’humanité.
2- Les « banques d’heures ».
Considérer les heures supp’ comme des « crédits horaires ». 2 heures de + au bureau mardi pour respecter une deadline serrée ? = Possibilité de repartir 2 heures plus tôt un jour calme. Encore mieux : Bree Groff explique qu’on a tout intérêt à commencer par de la générosité. Avant même que les équipes aient à travailler tard en période tendue, leur permettre de rentrer chez elles plus tôt en période creuse, si elles ont déjà fini leurs tâches. Vous le savez : le présentéisme est le pire ennemi de la productivité ET du bien-être. Obliger les salariés à rester au bureau jusqu’à 18h même si leur to do liste est déjà barrée ? Donnez-moi un antihistaminique, j’ai les yeux qui piquent.
Je rembourse le temps emprunté lors des périodes de rush. Le temps vaut de l’argent : il mérite le même respect. -B.G.
3- Travailler sans interruption.
Les anglophones appellent cela le “deep work” (travail profond). L’objectif ? Être totalement concentré pour finir sa tâche plus rapidement. Mission impossible entre le téléphone qui sonne, les notifications Slack et le bruit redouté de l’appel entrant Teams. D’où la nécessité de réserver, dans l’agenda de chaque salarié, des plages horaires non parasitées.
Collaboration & réunions : le minimalisme des meetings
1- Un noyau d’heures dédié à la collaboration.
Comme pour le deep work, fixer des créneaux quotidiens où tout le monde est disponible pour échanger. Cela évite le : « Patrick est en réunion client, Sandrine a un call urgent et Stéphane est à la compta ».
2- Des journées sans réunions.
Pour équilibrer : instaurer un ou plusieurs jours sans meetings. Personne n’aime avoir la moitié de sa journée rongée par des « points rapides ». Rien de tel pour s’éparpiller et tuer la créativité.
3- Pour cela, réduire la facture Zoom.
Passer en revue les sessions programmées automatiquement, et faire le tri. Toutes sont-elles vraiment indispensables ? C’est le moment d’alléger votre calendrier.
Que pouvez-vous faire pour « glamouriser » le fait de travailler moins, mais mieux ? -B.G.
Nos chers voisins européens
Vous êtes restés en France cet été ? Voici un petit tour des meilleures idées Made in Europe, pour vous faire voyager.
🇩🇰 Danemark : La flexisécurité.
Un modèle juridique qui permet aux entreprises d’embaucher mais aussi de licencier facilement. L’objectif : ajuster rapidement leurs effectifs aux fluctuations de production. En contrepartie, les salariés bénéficient d’une haute sécurité : indemnisation chômage poussée, formation continue…
🇩🇪 Allemagne :
Les Allemands savent faire preuve de souplesse avec process. Si vous avez appris l’Espagnol à l’école, attention aux éternuements !
- Kurzarbeit : le chômage partiel subventionné. Déclenché lors des crises ou creux d’activité. L’État indemnise les heures non travaillées afin d’éviter les licenciements.
- Arbeitszeitkonten. Atchoum ! Bree Groff n’a pas le monopole du système de « compte épargne-temps ». Les heures supp’ y sont stockées et redistribuées selon les besoins.
- Schichtarbeit : dernier mot compliqué. Ce « fonctionnement par roulement » permet à différentes équipes de se relayer pour gérer les pics.
🇳🇱 Pays-Bas : le temps partiel choisi.
Culture officielle du temps partiel, avec possibilité d’augmenter temporairement ses heures en fonction de ses besoins.
🇸🇪 Suède & 🇫🇮 Finlande : des horaires souples.
En Suède, plannings variables avec des plages fixes pour les réunions et la collaboration, le reste étant modulable. Côté finlandais, la loi garantit à chaque salarié le droit de choisir une partie de ses horaires & lieu de travail.
Vous avez vraiment tout lu ? Vous avez survolé les mots en gras ? Dans tous les cas, si vous devez retenir quelque chose, retenez ça.
> Refuser la culture du “above and beyond” : aller au-delà, c’est risquer la sortie de route.
> Ce n’est la faute de personne, et la responsabilité de tous. Mais les managers ne servent pas à « faire tampon ».
> Les équipes ne sont pas la variable d’ajustement de l’entreprise. Pour augmenter la marge, mieux vaut une stratégie commerciale viable.
> Anticiper les rushs, adopter les « crédits horaires » sans pour autant tenir les comptes.
> Préserver des temps de concentration sans interruption, mais aussi des plages pour collaborer.
> S’inspirer de nos voisins européens, en adaptant leurs bonnes idées au droit français.